Le 28 mars de l’an 2017, la Guyane se révolte. « On en a marre » scande à l’unisson la foule en créole guyanais, « Nou Bon Ké Sa« , « Nou Bon Ké Sa » . La sécurité, l’éducation et la santé sont au cœur des revendications qui soulignent les disparités entre les DOM-TOM et la Métropole.
Les « 500 Frères »
Le 16 février 2017, le collectif des « 500 frères contre la délinquance » mais aussi « Citoyennes et citoyens et « Femme Dibout » lancent un appel de mobilisation contre la hausse de la criminalité liée aux conditions de vie, et faible PIB de l’ile. L’action est ensuite portée par une grève syndicale, le 20 mars de «l’Union des travailleurs guyanais , qui a fini par se transformer en mouvement social et geler le pays: principalement la Cayenne, le chef lieu du département avec une mobilisation de plus de 15 000 personnes. Le 28 du même mois, surnommé « la Journée Morte » , le département tout entier est gelé; et les manifestants tout de noir vêtus se déplacent cagoulés, et bloquent les accès routiers.
Il convient de souligner le caractère pacifique de l’action tel que le précise Zadkiel Saint-Orice, porte parole des « 500 frères ».
Les co-auteurs de l’ouvrage, « Les Racines de la mobilisation de mars avril 2017 », Jean Moomou et Serge Mam Lam Fouck proposent une rétrospective de la crise en Guyane, qui prend racine au XIX siècle, et se confirme en 1992. Deux repères historiques clés, pour la compréhension de ce mouvement de révolte contre les inégalités en comparaison avec la Métropole. Un mouvement qui connait une compagne de désinformation depuis la France. Le pays est dans une impasse.
Il est à rappeler que la France débute son expansion coloniale dés le XVII siècle pour des raisons économiques. Le commerce transatlantique des îles des Caraïbes était axé sur le tabac, le sucre, le coton et traite des esclaves. C’est de cette longue tradition coloniale et esclavagiste que sont nés les DOM-TOM. « D’un point de vue géopolitique les DOM-TOM constituent un réseau de points d’appui pour la présence française dans trois zones importantes : le Pacifique Sud, les Caraïbes et l’Océan Indien. [ ] Forment une chaîne de relais de télécommunications, de radars et d’écoute. [ ] l’outre-mer permet à la France de posséder la 3 ème plus grande zone économique exclusive (ZEE), alors que sans ces îles elle n’occuperait que le 45ème rang. » Expliquent les économistes Jean – Michel SALMON et Martine ANTONA. Une réalité économique occultée et travestie en « Mission civilisatrice »
Département d’outre-mer depuis le 19 mars 1946, la Guyane fait partie des quatre DOM avec la Guadeloupe, la Martinique, la Réunion, s’ensuivra un aménagement des colonies. Ainsi, la notion de « colonie » y est troquée par une série de terminologie avec une totalité de treize territoires répertoriés comme suit : DOM (Département d’outre-mer) TOM ( Territoire d’outre-mer) mais aussi des CDOM (Collectivité départementale), POM ( Pays d’outre-mer), CTOM ( Collectivité territoriale à statut particulier). Précisons que le dernier statut concerne la Nouvelle Calédonie, qui a été reconnu par l’ONU depuis 1988, et qui se trouve en phase de transition pour l’indépendance; mais le référendum pour l’autodétermination est repoussé pour 2018 .
Leila Assas
Bibliographie :
- Jean – Michel SALMON, Martine ANTONA, LE DEVELOPPEMENTSOCIO-ECONOMIQUE DANS LES DOM-TOM: ETAT DES LIEUX Juin 1991 DRV/SEM
- www.survie-france.org, / La France coloniale d’hier et d’aujourd’hui (Survie est une association (loi 1901) qui milite pour une réforme de la politique de la France en Afrique, lutte contre la banalisation des crimes contre l’humanité et des génocides, et fait la promotion des Biens publics à l’échelle mondiale.)
- Emmi Rantanen L’OUTRE-MER FRANÇAIS APRÈS LA RÉFORME CONSTITUTIONNELLE DE 2003, Centre de langues, Université de Jyväskylä 2007
- Illustration: https://www.la-croix.com/France/Guyane