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Cela s’est passé un 7 mai 1946, la France coloniale octroie la citoyenneté à ses sujets

colonieLa loi Lamine Gueye proclame citoyens tous les ressortissants des territoires d’outre-mer, y compris les algériens.

Jusque là, la république fait une différence fondamentale entre les « citoyens » français et les « sujets » français. Ces derniers, soumis au code de l’indigénat, ont le droit de payer des impôts et de mourir pour la patrie française, mais n’ont pas de droits civiques. Ils ne comptent pas dans le débat politique.

Après le manifeste de Ferhat Abbas pour défendre le principe de la personnalité algérienne, signé par 28 élus musulmans et publié le 10 février 1943, De Gaulle fera un geste symbolique avec l’ordonnance du 7 mars 1944. Celle-ci stipule entre autre que «Les Français musulmans d’Algérie jouissent de tous les droits et sont soumis à tous les devoirs des Français non musulmans» et que «Tous les emplois civils et militaires leur sont accessibles».

Elle sera jugée restrictive et sans grande portée politique par les leaders politiques algériens de l’époque qui la réfute. Deux ans plus tard, une nouvelle conception de la citoyenneté indépendante du statut civil est reprise dans la loi du 7 mai 1946, la loi Lamine-Gueye, qui déclare tous les ressortissants des territoires d’outre-mer, Algérie comprise, citoyens français.

La loi n° 46-940 du 7 mai 1946, tire son nom de son proposant, Lamine Guèye, alors maire de Dakar et député socialiste de Sénégal-Mauritanie à l’Assemblée nationale constituante. Elle se réfère à l’édit de Caracalla en 212 après Jésus-Christ, qui faisait citoyen romain tous les administrés de l’empire.

A travers un article unique, cette loi stipule : «A partir du 1er juin 1946, tous les ressortissants des territoires d’outre-mer (Algérie comprise) ont la qualité de citoyen, au même titre que les nationaux français de la métropole et des territoires d’outre-mer. Des lois particulières établiront les conditions dans lesquelles ils exerceront leurs droits de citoyens. 

La présente loi, délibérée et adoptée par l’Assemblée nationale constituante, sera exécutée comme loi de l’Etat. »

La Constitution française de 1946 reprendra et entérinera la loi Lamine Gueye en spécifiant : « Des lois particulières établiront les conditions dans lesquelles ils [les indigènes de statut particulier] exerceront leurs droits de citoyens ».

Cette précision devait permettre d’organiser temporairement l’exercice des droits politiques de ces nouveaux citoyens d’une manière différente. En d’autres termes, une sorte de transition parce qu’il serait difficile d’abroger tout le droit antérieur, relatif à la condition des Français au statut personnel non régi par le code civil. On a jugé qu’un changement aussi brusque aurait perturbé gravement le fonctionnement des services publics.

Concrètement, ces atténuations apportées au principe d’égalité politique se traduiront par le maintien du double collège créé par l’ordonnance du 7 mars 1944 pour les élections nationales – par conséquent des membres de l’Assemblée nationale du Conseil de la République, de l’Assemblée de l’Union française – et des assemblées locales.

Pour les élections nationales, le premier collège regroupe les citoyens de statut personnel régis par le code civil et les citoyens de statut personnel musulman de sexe masculin qui répondaient, grosso modo, aux conditions de l’ordonnance du 7 mars 1944. Le second collège regroupe les autres citoyens de statut personnel musulman de sexe masculin. Les deux collèges envoient le même nombre de représentants aux Chambres, ce qui permet d’assurer encore un temps l’influence politique des citoyens de statut personnel régis par le code civil, tout en permettant l’accroissement de l’importance de l’électorat de statut personnel musulman.

 Il en va de même pour les élections locales, avec toutefois une représentation moindre des élus du second collège par rapport au premier.

 

Synthèse Babzman.

 Bibliographie :

  1. « Le puzzle de la citoyenneté en Algérie », par Louis-Augustin Barrière, Professeur à l’Université de Franche-Comté. Article extrait du « Plein droit » n° 29-30, novembre 1995 « Cinquante ans de législation sur les étrangers »
  2. https://www.contreculture.org

 

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