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Black Panthers | Guérilla Urbaine Sociale

Black Panther-posterAux Etats-Unis, en 1967, deux événements entérinent la division des mouvements de la communauté noire : pour la première fois dans l’histoire américaine, un afro-américain, Carl B. Stokes (1927-1996) [1], est élu par ses concitoyens maire d’une grande ville, Cleveland, en Ohio ; 1967 est également l’année de l’ouverture du premier bureau du Black Panthers Party à Oackland en Californie. 

Entre combat institutionnel et lutte radicale

Ainsi, symboliquement, 1967 marque une rupture, une charnière pour le mouvement Noir [2], le basculement de la perspective dominante des Droits civiques et du pacifisme exigé par Martin Luther King, vers l’idée du Black Power, déjà actif en 1964, qui réclame bien plus que des droits : le pouvoir au sens le plus large, la justice, et qui débouchera sur une remise en cause de la mixité « raciale » et de l’action légaliste. Deux conceptions à partir de 1967 vont s’opposer : celle des Noirs de la bourgeoisie réformiste, bien intégrée dans la société ainsi que l’upper middle class et celle des groupes agissant pour les Have-not, les populations vivant dans les ghettos des grandes villes.

Se voulant une avant-garde révolutionnaire, anti-capitaliste, les Black Panthers ne cherchaient pas seulement à libérer les Noirs de leur environnement répressif : « Pour nous, il s’agit d’une lutte de classes entre la classe ouvrière prolétarienne, qui regroupe les masses, et la minuscule minorité qu’est la classe dirigeante. Les membres de la classe ouvrière, quelle que soit leur couleur, doivent s’unir contre la classe dirigeante qui les opprime et les exploite. (…) Nous croyons que nous menons une lutte de classe, pas un combat racial. » La ligne la plus importante au sein du BPP – celle de Newton et de Seale – est celle de l’unité en une seule classe des travailleurs blancs et de couleur, même si des voix dissonantes accordaient le primat de la lutte aux minorités « colorées » et refusaient de s’associer avec des Blancs.
Le BPP est donc un mouvement protéiforme, traversé par plusieurs courants, révolutionnaire et réformiste radicaux s’affronteront pour déterminer la ligne de conduite politique. Mais, pour un temps, en son sein, le courant marxiste-léniniste est prédominant. Idéologiquement, le BPP se réclame comme parti marxiste-léniniste, adapté aux exigences de leur condition et de l’époque ; en sachant qu’en 1968, nombre d’organisations et de personnalités affichaient ouvertement leurs convictions politiques radicales marxistes, comprenant bien sûr, des « révolutionnaires de salon ». 

[ ]Le BPP lutte pour le socialisme, comme utopie à réaliser : disparition de l’impérialisme au niveau mondial, abolition de la propriété privée des moyens de production, orientation sur les besoins des gens et non les profits, contrôle  de la production et distribution de la richesse sociale, co-participation de chacun au processus social, fin de l’exploitation et du travail aliénant, abolition de l’État. Tels sont les grands traits de la société pour laquelle se bat les panthères Noires, ce qui n’exclut pas qu’au fur et à mesure de la venue de nouveaux militants, d’autres visions moins radicales et plus portées sur ce que certains considèrent comme de l’assistanat social. Dans les faits, le « liant » entre ses antagonismes, sera l’action entreprise dans les ghettos pour servir le peuple, et plus particulièrement le lumpenproletariat de la « colonie », classe sociale délaissée par les marxistes. 

Un  lumpenproletariat  défini très précisément : ceux qui n’ont pas de lien assuré avec les moyens de production et les dispositions de la société capitaliste, l’armée de réserve de chômeurs « structurels »  n’ayant jamais travaillé, et de formation, et tous ceux qui vivent de l’aide sociale. Sont ainsi intégrés les « criminels », les « voleurs », ceux qui ne veulent pas de travail, haïssent le travail. Si l’opposition travailleurs/lumpen est claire dans la « mère patrie », dans la colonie il y a beaucoup plus de liens, de rapports, les frontières disparaissent. Comme on le voit la définition marxiste de « lumpen » est revisitée, et adaptée au fait que le lumpen américain est constitué en grande part de Noirs.

Dans l’histoire des luttes urbaines, le Black Panthers Party occupe une place majeure car ce sont dans les quartiers, et le plus souvent dans les quartiers pauvres et les ghettos, que les Black Panthers mèneront leurs actions, et non pas dans les lieux de travail, les usines, principales et traditionnelles cibles des organisations marxistes. Aux syndicats, ils préfèrent les campus universitaires qui seront, dans un premier temps, les foyers d’adhésion puis de recrutement, la source alimentant les premiers membres et adhérents qui imagineront le mode organisationnel et la ligne politique du mouvement ; mais par la suite, le recrutement spontané ou organisé se fera aussi parmi les habitants des quartiers pauvres des villes. Et si le nombre de Panthers ne sera jamais élevé, la communauté noire des classes moyenne et populaire leur accordera la plus grande sympathie, sensible aux multiples actions sociales organisées et mises en place pour leur assurer de meilleurs conditions de vie, et de sécurité. Le Black Panthers Party n’a probablement jamais compté plus de 5 000 militants entre 1967 et 1971, mais son aura dépassa alors largement sa puissance numérique dans les centres-villes déshérités. Ils enrôlaient les plus motivés, impressionnaient les timides, forçaient l’admiration des autres mouvements, des grandes personnalités de l’intelligentsia internationale [Jean Genet, Sartre, etc.], du monde des arts et du spectacle [Bob Dylan, Marlon Brando, The Rolling Stones, etc;], et pouvaient compter sur l’aide effective dans chaque ville, d’une armée de sympathisants.

Serve the people !

Car en effet, au-delà des actions spectaculaires, des Negro Citizen Alert Patrols, le Black Panthers Party organisa dans les quartiers/ghettos des grandes villes, un véritable programme social parallèle destiné à pallier la déficience, voire l’absence, de celui du gouvernement : des aides juridiques, des cantines scolaires pour les enfants des ghettos, des associations de locataires, des dispensaires, des distributions de vêtements, et ce, gratuitement. Mais également des services d’entraide destinés à, par exemple, réparer une plomberie récalcitrante ou dératiser un immeuble. Des programmes à caractère social que les Blacks Panthers avaient coutume de nommer, les programmes de survie, tant les difficultés de toutes sortes assaillaient la communauté noire, tant le racisme était à ce point développé dans les consciences des WASP.

[ ] Conscientisation politique

Ce fut là, le travail principal du Black Panthers Party : éveiller la conscience des masses, les amener au Parti. Les principaux leaders et les théoriciens seront rapidement assassinés, ou condamnés à de lourde peine de prison, ou en exil [Cuba, Algérie], mais les bases qu’ils posèrent animeront la multitude de débats, de journées de conscientisation politique, de conférences, de workshops, de réunions, etc. organisés par les bureaux.

 

Lire l’article dans son intégralité :  https://laboratoireurbanismeinsurrectionnel.blogspot.com/2011/10/les-black-panthers-dans-la-ville.html

 

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